L'homosexualité hante le sport. Elle suscite toujours des réactions extrêmes ou gênées. Tabou dans les vestiaires, expression violente dehors.
Open d'Australie, 1999, coming out d'Amélie Mauresmo. « J'ai fait une interview pour Le Figaro. La journaliste voulait écrire un portrait, elle m'a demandé pourquoi j'avais déménagé. Je lui ai répondu que mon amie vivait à Saint-Tropez, et qu'“amie”, c'était “ie” », raconte la championne du monde.
Dix ans plus tard, Gareth Thomas, légende du rugby, déclare ses préférences. Un tremblement de terre dans le milieu. Mais ces cas demeurent exceptionnels.
Corps en jeu
« Dans le sport, la sociabilité se forge dans l'entre-soi du même sexe. D'où les questions… Que font les hommes entre eux, les femmes entre elles ? Qu'est-ce qui se joue dans ces jeux sexués ? Qu'est-ce que cette connivence ? » analyse le sociologue Eric Fassin.
« C'est univers du corps avec notamment le rite de la douche. Une des raisons de l'homophobie, c'est de chasser le soupçon d'homosexualité.
Surtout que le sport et la culture gay partagent les mêmes normes du corps. N'importe quel sportif peut faire la couv » de Têtu. L'homophobie est donc une manière de tracer la frontière entre le sport et l'expérience gay. »
Sylvain Ferez, auteur de « Le Corps homosexuel en-jeu. Sociologie sport gay et lesbien », remarque :
« L'homo émerge en négatif, en tant que contre-modèle. Le pédé, c'est l'adversaire, celui qui échoue ou n'est pas performant. »
A contrario, on imagine la sportive en « garçon manqué » et lesbienne. « L'idée que nous sommes toutes plus moins homos est si tenace qu'il faut toujours se justifier », déplore la tenniswoman Nathalie Tauziat dans « Les Dessous du tennis féminin ».
Un cliché rassurant, parfois perçu comme un facteur explicatif de la performance. « L'exemple d'Amélie Mauresmo est très significatif. Son jeu, sa force de frappe des balles étant proches de ceux de ses homologues masculins, son homosexualité publiquement déclarée a rassuré une partie la gent masculine : ceci expliquerait cela… Et aussi une partie de la gent féminine », écrivent Pascal Duret et Dominique Bodin, auteurs de « Sport en question ».
En effet, la rivale de Mauresmo, Martina Hingis, a justifié la performance de son adversaire par le fait qu'elle serait « à moitié homme ».
Gay ou communautariste ?
Dès les années 80, cette homophobie dominante pousse des gays à créer leur propre mouvement sportif. 1982, San Francisco, à l'initiative du décathlonien américain Tom Wadel, les premiers jeux gays et lesbiens réunissent 1 700 participants. Une fédération voit le jour.
Communautarisme ? « Non ! » a répondu son ex-président Robert Mantaci lors d'un colloque de l'université de Lyon, en décembre 2006.
« Contrairement à ce que beaucoup croient ou disent, les Gay Games ne sont pas réservés qu'aux personnes issues de la communauté gay. Il s'agit de faire un pont entre celle-ci et la communauté sportive ordinaire. »En France, le Paris Foot Gay est dans cet esprit. 2005, Paris est candidate pour les Gay Games 2010. La résistance, portée par l'élu Bernard Debré – qui signe le 17 décembre 2005 dans Le Figaro la tribune « Non aux gays games » – est farouche : la ville n'aura pas les Jeux.
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